Le mois d’avril a vu deux épisodes significatifs dans la montée des tensions entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie. Le 11 avril, les forces armées azerbaïdjanaises ont avancé dans la région de Syunik, en direction du village de Tegh e t ouvert le feu sur les forces armées de la République d’Arménie effectuant des travaux de fortifications. Cette action et la riposte des forces armées arméniennes qui s’en est suivie a fait des blessés et des morts des deux côtés. Le 23 avril, les forces armées azerbaïdjanaises ont installé un poste-frontière devant le poste-frontière russe de Hakar à l’entrée du corridor de Latchin pour contrôler la liaison entre l’Arménie et la région du Haut-Karabakh.
Le 23 avril, une délégation du Sénat français, conduite par Bruno Retailleau, Président du groupe de liaison avec les Chrétiens d’Orient, et composée de Catherine Morin-Desailly, vice-présidente, Gilbert-Luc Devinaz, Président du groupe d’amitié France-Arménie et Christine Lavarde, est arrivée en Arménie.
🗨️ “ Nous considérons l’ouverture du corridor de Lachine et le maintien du territoire souverain de l’Arménie comme un seul problème. Nous devons être prêts à fournir à l’Arménie les moyens nécessaires pour préserver ses territoires souverains. Nous avons à plusieurs reprises élevé la voix en faveur de l’Arménie et du Haut-Karabagh, et cette fois, nous exigeons des sanctions contre l’Azerbaïdjan”, a déclaré le sénateur français Bruno Retailleau. Les sénateurs français ne comprennent pas comment le monde applique des sanctions contre la Russie, qui a empiété sur les territoires souverains de l’Ukraine, et ne met pas en place de sanctions contre l’Azerbaïdjan.
▶️La visite des sénateurs français a été suivie d’une autre visite de haut niveau de la France : la ministre des Affaires étrangères, Catherine Colonna, s’est rendue dans la région du Vayots Dzor, où elle a rencontré le chef de la mission civile européenne d’observation. Selon la ministre, il était important de se rendre à Djermouk afin, d’une part, de montrer son soutien à la mission d’observation, et d’autre part, de constater de ses propres yeux la situation sur le terrain là où l’attaque du mois de septembre 2022 a été la plus offensive.
▶️Lors de la visite, le chef d’état-major général des forces armées arméniennes, Edward Asryan, a présenté les dommages subis à la suite de l’agression militaire de l’Azerbaïdjan à la ministre française, notant que l’Azerbaïdjan avait attaqué des territoires souverains de l’Arménie dans cinq directions, dont deux dans la région de Syunik, deux dans la région de Gegharkunik et un à Vayots Dzor. Asryan a également informé la ministre française des Affaires étrangères que lors de l’attaque, l’Azerbaïdjan avait utilisé des roquettes, de l’artillerie et des drones, frappant à la fois des cibles militaires, économiques et civiles. Selon les données rapportées par l’état-major général, à l’heure actuelle, l’Azerbaïdjan occupe environ 139 km² du territoire souverain de l’Arménie.
🗨️ “Nous apprenons la situation sur la base de documents, mais la voir de nos propres yeux est très importante. Et avec cette visite, nous réaffirmerons une fois de plus notre soutien et notre coopération avec le peuple arménien ami”.
🗨️”La France appuiera toute solution permettant de garantir que les populations arméniennes du Haut-Karabagh puissent continuer d’y vivre en sécurité, dans le respect de leur histoire, de leur patrimoine et de leur culture. C’est leur droit le plus strict.”
▶️Lors d’une conférence de presse conjointe le 28 avril 2023, Catherine Colonna et Ararat Mirzoyan, ministre des Affaires étrangères de la République d’Arménie, ont souligné les deux principaux défis auxquels est confrontée l’Arménie, à savoir la négociation de la paix avec l’Azerbaïdjan et la modernisation du pays. La conférence a également abordé la question de la déstabilisation provoquée par l’agression de la Russie contre l’Ukraine, ainsi que l’importance du développement des relations entre la France et l’Arménie dans différents domaines. Point d’évocation de sanctions possibles pour la diplomatie française, pour qui le rôle de la communauté internationale se borne, à ce stade, à soutenir le processus de négociations entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan.
🗨️ “La France soutient et encourage le processus de négociations de paix en cours. […] Nous ne pouvons pas approuver des avancées en territoire d’autrui, le droit international doit être respecté. Nous ne pouvons pas admettre les pas unilatéraux faits par l’Azerbaïdjan et je l’ai dit là bas. Je salue le rôle de la mission de l’UE dans la diminution de la tension et qui pourra permettre aux membres de l’UE de prendre leurs décisions sur un état de fait objectif et ceci servira à renforcer la confiance.”Catherine Colonna
Parmi les pays de la communauté internationale, la France se distingue par ces témoignages d’“amitié”, sans toutefois sortir franchement du registre du symbolique. La position du médiateur et de l’ami, difficile à tenir sur le long terme, montre des signes d’enlisement. Tandis que Bakou critique ouvertement la France pour ces gestes allant jusqu’à contester toute légitimité de médiateur à la France et oubliant fort opportunément les contrats qui lient la France et l’Azerbaïdjan dans le domaine de la sécurité, la coopération France-Arménie est à peine embryonnaire dans ce domaine. Ce dernier fait pourtant partie des attentes prioritaires des Arméniens, en France comme en Arménie.