Prises de parole à risque en Azerbaïdjan

La récente agression militaire contre l’Arménie suscite une réaction interne inhabituelle en Azerbaïdjan. A côté de l’écrasante majorité qui soutient le choix de la violence revendiqué par le gouvernement azerbaïdjanais, des voix courageuses osent exprimer leur désaccord public, malgré les conséquences potentielles. Éclairage sur trois de ces activistes. Numéro 3 : Samad Shikhi

L’écrivain azerbaïdjanais Samad Shikhi, connu pour ses essais sur l’espoir d’une paix durable entre les deux pays voisins, remarque que la situation actuelle est tout à fait différente de celle de 2020. Dans une interview donnée à OC Media le 22 septembre 2022, ce dernier explique que s’il y a deux ans, le gouvernement azerbaidjanais avait le soutien total du peuple, cette fois-ci une partie de la population “ne peut pas retrouver l’enthousiasme de 2020.” “Ils pensent que s’ils se battent à nouveau, ils souffriront encore une fois.” L’écrivain fait également remarquer que le gouvernement d’Aliyev a modifié sa rhétorique pour tenter d’obtenir le soutien de la population, en inventant une “République de Goycha-Zangazur” afin de soutenir les prétentions de l’Azerbaïdjan sur les régions du sud et de l’est de l’Arménie. 

A côté des insultes et des menaces de mort à la suite de ses publications anti-guerre, Samad Shikhi reçoit également des messages de soutien. Selon l’écrivain azerbaidjanais, le seul moyen de lutter contre la guerre, c’est la confrontation avec le pouvoir azerbaidjanais. “Le récit de la “guerre permanente” était utilisé par le président Aliyev pour “protéger son pouvoir” face à un paysage socio-économique national difficile”, explique Samad Shikhi. “ À l’heure actuelle, le fardeau retombe sur les personnes qui sont contre la guerre. La tendance à l’augmentation de la population qui s’exprime montre que ceux qui sont contre la guerre devraient trouver plus de courage et être mieux organisés afin de pouvoir jouer le jeu du pouvoir actuel. C’est ainsi que nous pourrons dépasser le discours souhaité par les autorités”. L’écrivain en est convaincu : tant qu’il n’y aura pas de force politique totalement indépendante du gouvernement, qui ait une proposition alternative pour la résolution du conflit, l’effusion mutuelle de sang continuera.