Dans la région du Caucase du Sud, l’Arménie se démarque par ses avancées prometteuses dans le domaine de l’intelligence artificielle (IA). Elle est devenue le premier pays au monde à appliquer la technologie de l’IA dans le domaine de l’aide sociale. Il n’est pas rare de voir des chercheurs arméniens dans ce domaine publiés dans des revues scientifiques internationales. En dépit de ces pousses prometteuses, des difficultés structurelles restent à surmonter pour assurer leur croissance, tel que l’écart entre le potentiel scientifique et le niveau d’investissements dans le domaine de l’IA.
Il y a près d’un an, l’Arménie est devenue le premier pays au monde à utiliser la technologie de l’IA dans le domaine de l’aide sociale, un programme mis en place par le ministère du Travail et des Affaires sociales. La technologie de l’intelligence artificielle aide les travailleurs sociaux à identifier plus efficacement les personnes vulnérables. Elle permet également d’analyser l’efficacité des programmes d’emploi, d’effectuer des simulations analytiques pour le développement de politiques basées sur des données, et de créer de nouveaux groupes de personnes vulnérables. De plus, au cours de l’année précédente, le gouvernement arménien, en partenariat avec la Fondation pour la science et la technologie arméniennes (FAST), a lancé le programme d’enseignement Generative AI ( il s’agit d’une catégorie d’IA capable de créer du texte, des images, de la vidéo, de l’audio ou du code) au sein du système éducatif public.
Datafest Erévan 2023 : conférence internationale sur l’IA à Erevan
Depuis déjà quatre ans, la capitale arménienne accueille la conférence internationale “Datafest Erevan” sur l’intelligence artificielle. Cette année, l’événement s’est déroulé les 8 et 9 septembre à l’Université américaine d’Arménie. Trente-sept spécialistes en provenance de dix pays différents ont participé à la conférence, partageant leur expérience, leurs modèles d’intelligence artificielle et les derniers développements dans ce domaine avec les représentants du secteur et les amateurs.
Hrant Khachatryan, co-organisateur de la conférence, a souligné que cet événement illustre la rapide croissance du domaine de l’intelligence artificielle en Arménie. Cette année, la participation a augmenté de 40 % par rapport à l’année précédente, et la qualité des présentations des équipes arméniennes a nettement progressé par rapport aux années précédentes. Khachatryan a également noté que certains rapports arméniens ont été présentés sur des plateformes internationales, ce qui témoigne de leur qualité. Lors de l’édition “Datafest Erevan 2023”, des représentants d’organisations de premier plan telles que HuggingFace, DeepMind, Amazon Web Services, WANNA, Microsoft, et d’autres ont prononcé des discours. Bien que la participation internationale ne soit pas encore très étendue, l’objectif pour les années à venir est d’attirer davantage de participants étrangers.
Potentiel important, ressources limitées
Les noms des chercheurs arméniens sont fréquemment en tête des publications scientifiques internationales récentes liées à l’intelligence artificielle : Armen Aghajanyan, Hrant Khachatryan, Hovhannes Tamoyan, Karen Hambardzumyan, et Rafael Darbinyan. Hormis Armen Aghajanyan, ils font tous partie du laboratoire scientifique ErevaNN qui joue un rôle crucial dans le développement de la technologie de l’intelligence artificielle et contribue activement à la recherche scientifique qui servira de fondement aux technologies futures. Les travaux scientifiques auxquels des chercheurs arméniens ont participé ont déjà donné des résultats concrets. Sur cette base, un modèle d’intelligence artificielle a été développé, capable de générer à la fois du texte et des images. En comparaison, la plupart des programmes populaires actuels se spécialisent dans l’une ou l’autre de ces tâches.
Mais malgré ces percées prometteuses, l’Arménie doit faire face à de nombreux défis et au besoin d’investissements importants. “Dans le domaine de l’intelligence artificielle, la puissance de calcul joue un rôle crucial. Par exemple, une seule de mes recherches a nécessité plus de puissance de calcul que celle disponible dans l’ensemble de l’Arménie. Ce manque de capacités informatiques constitue un obstacle majeur pour l’Arménie, compromettant sa capacité à obtenir des résultats significatifs dans le domaine de l’intelligence artificielle”, souligne le jeune chercheur Arman Aghajanyan. Son collègue Hrant Khachatryan fait remarquer qu’il n’existe pas en Arménie d’ordinateurs dotés de capacités suffisantes pour mener des expériences et des recherches à grande échelle dans le domaine de l’intelligence artificielle.
Les chercheurs ont demandé au ministère des Hautes Technologies d’acquérir un supercalculateur composé de 8 ordinateurs puissants, mais la question du financement n’en est qu’au stade des discussions préliminaires. La compétition intense dans le domaine des capacités informatiques entre les grandes entreprises ne donnera pas le loisir de réfléchir longtemps: le développement du potentiel scientifique de l’Arménie dans ce domaine, comme d’autres, nécessitera des capacités de financement à la hauteur.