Après l’amplification du narratif gouvernemental sur les “provocations arméniennes” ces dernières semaines, les médias azerbaïdjanais prennent le relais dans la préparation de la société à une opération militaire contre le Haut-Karabakh. Lors d’un direct, la chaîne de télévision publique, AzTV, a réalisé un sondage sur YouTube, demandant à l’audience si elle était favorable à une nouvelle opération militaire contre Stepanakert. Bien que le sondage ait depuis été retiré, des captures d’écran témoignent encore du score massif de 83% de près de 300 répondants en faveur du “oui”.
Les médias d’État azerbaïdjanais évoquent de plus en plus fréquemment une possible nouvelle opération militaire au Haut-Karabakh. Ces messages sont particulièrement fréquents sur AzTV, qui a diffusé au moins trois reportages depuis dimanche dernier mettant l’accent sur les prétendues “provocations” de l’Arménie et les “opérations de représailles” potentielles des forces armées azéries contre le Haut-Karabakh.
Dans l’un des reportages diffusés lundi dernier sur AzTV, une date éventuelle était même donnée pour l’opération “Revenge-3”, avant la rencontre des dirigeants arménien et azéri à Bruxelles le 21 juillet. La chaîne a également déclaré que la France et la Russie avaient un “accord secret” concernant le conflit et que des troupes russes appartenant au groupe paramilitaire Wagner avaient été déployées en Arménie.
Caliber, un média affilié au ministère de la Défense azéri, a également averti samedi de la préparation d’une opération “Revenge-3” dans un article intitulé “Nouvelles provocations = nouvelles tombes à Yerablur”, en référence au cimetière militaire de Yerablur dans la capitale arménienne.
Cette mention de Yerablur, en plus d’être une menace non voilée, s’insère dans le narratif de Bakou sur “l’armée du Haut-Karabakh”. Bakou est résolu à dissoudre le corps d’autodéfense des Arméniens du Haut-Karabakh en alléguant qu’il est constitué de soldats venant d’Arménie et que ce faisant l’Arménie s’ingère dans les affaires internes de l’Azerbaïdjan et tente de démanteler l’Etat azerbaïdjanais en soutenant activement des séparatistes. Avant la guerre de 2020, les forces armées d’Arménie et du Haut-Karabakh étaient dans les faits intégrées. Le changement radical de rapport de forces à la fin de la guerre et le déploiement des troupes d’interposition russes dans la région du Haut-Karabakh ont séparé radicalement les deux corps. Depuis l’instauration du blocus de Latchine, au mois de décembre 2022, les biens de première nécessité ne passent que difficilement l’inspection azerbaïdjanaise; on voit mal comment des soldats arméniens pourraient trouver à passer. Les forces d’autodéfense du Haut-Karabakh, considérablement réduites et affaiblies depuis novembre 2020, constituent un faible mais néanmoins important élément d’autodéfense pour la population du Haut-Karabakh qui vit sous siège depuis plus de 6 mois.