Condamnations discriminatoires et arbitraires, chefs d’accusation pléthoriques ou ubuesques, à Bakou, l’emprisonnement est utilisé comme une arme diplomatique, au mépris du droit à la justice des personnes ainsi détenues. Au moins deux ressortissants français sont concernés, tandis qu’un troisième tombe sous le coup d’une interdiction arbitraire de quitter le territoire azerbaïdjanais.
Le graffeur Théo Clerc a été condamné le 10 septembre 2024 à trois ans de prison par un tribunal azerbaïdjanais pour un graffiti dans le métro. Cette décision contraste fortement avec le traitement réservé à ses deux co-accusés, un Néo-Zélandais et un Australien, qui ont écopé d’une simple amende pour des faits identiques. Le ministère français des Affaires étrangères a dénoncé cette situation, soulignant un traitement discriminatoire envers le ressortissant français, tandis que Bakou a rejeté les critiques de Paris, qualifiant ces accusations d’« inacceptables » et « infondées ».
Outre Théo Clerc, un autre Français, Martin Ryan, est actuellement détenu en Azerbaïdjan où il est accusé d’espionnage. Ces accusations sont fermement rejetées par Paris, qui y voit des allégations sans fondement. En avril dernier, le ministère des Affaires étrangères avait réitéré son rejet catégorique des arguments avancés par Bakou pour justifier ses actions. Un troisième ressortissant français est interdit de quitter le territoire depuis juillet 2024, une mesure dénoncée comme « arbitraire » par les autorités françaises, qui en exigent la levée immédiate. Depuis début septembre 2024, le Ministère de l’Europe et des Affaires étrangères français déconseille “aux ressortissants français, y compris binationaux, de se rendre en Azerbaïdjan” où “ils s’exposent à un risque d’arrestation, de détention arbitraire et de jugement inéquitable”.
Ces incidents s’inscrivent dans un contexte de répression accrue en Azerbaïdjan, où la justice est régulièrement accusée de servir les intérêts du régime autoritaire du président Ilham Aliyev. Selon Freedom House, le pays obtient un score alarmant de 7/100 pour la liberté globale, avec 0/40 pour les droits politiques et 7/60 pour les libertés civiles, le plaçant parmi les trois régimes les plus répressifs de toute la zone comprise entre l’Europe centrale et l’Asie centrale, à peine mieux que le Turkménistan et au niveau de la Russie et du Tadjikistan.
Les Arméniens subissent la même tyrannie depuis 2020, dans des conditions plus dramatiques. 15 citoyens arméniens sont détenus depuis la guerre des 44 jours en 2020 en Azerbaïdjan, au mépris de la Convention de Genève et des engagements pris par ce pays via le cessez-le-feu de novembre 2020 de libérer tous les prisonniers.
8 anciens représentants politiques du Haut-Karabakh (président, ministres, députés) sont détenus depuis septembre 2023, parmi lesquels Ruben Vardanyan, philanthrope et homme d’affaires, qui fait face à 45 chefs d’accusation et une menace de réclusion à perpétuité.