La région de Syunik, porte sud de l’Arménie, a été confrontée à de grands défis en 2023, résultant principalement des événements liés à l’Artsakh. Une frontière autrefois tranquille est devenue, depuis novembre 2020, un des épicentres des attaques azerbaïdjanaises. Des tirs fréquents en direction des localités frontalières rendent les activités des populations risquées. Le travail agricole, part essentielle de l’économie locale, est fortement entravé.
À la suite de la guerre des 44 jours en 2020 et des opérations militaires azerbaïdjanaises qui ont suivi, la région de Syunik, porte sud de l’Arménie, a subi des changements drastiques affectant non seulement la vie des Arméniens d’Artsakh mais également celle de ses propres habitants. La région, désormais une zone frontalière, est devenue la cible des soldats azerbaïdjanais qui cherchent à rendre la vie insupportable à la population locale. Sur 500 km de frontière, 420 présentent un danger quotidien. Les activités agricoles et d’élevage, principales occupations des habitants, sont désormais compromises en raison des incessantes perturbations des forces azerbaïdjanaises, entraînant des pertes considérables pour quelque cent trente agriculteurs de la région.
Les provocations azerbaïdjanaises ont également des conséquences économiques. Plus de 60 familles sont privées de leurs champs cultivés. Les villageois s’inquiètent de la restitution de leurs terres, d’autant plus que l’Azerbaïdjan a entrepris des travaux d’ingénierie passant sur les cultures. Cette situation a provoqué une diminution des pâturages, rendant l’élevage non rentable malgré la hausse des coûts de fourrage. Malheureusement, cette instabilité risque de déclencher une nouvelle vague d’émigration, laissant les territoires sans défense. Des incidents climatiques, tels que la grêle et de fortes pluies, ont ajouté des difficultés aux villages des communautés de Sisian, Goris et Tatev en mai et juin 2023, détruisant vergers, champs et emportant du bétail.
Au titre des évolutions positives : l’ouverture de l’aéroport de Kapan, en dépit de la situation sécuritaire tendue. Les liaisons aériennes mettent la capitale, Erevan, à environ 40 mn de vol, contre plus de 4 h en voiture. Un premier vol transportant 19 personnes a eu lieu en 2023. Des vols sont également envisagés vers Téhéran également. Des travaux de réfection des routes dans différentes communautés de la région ont également été entrepris. La pérennisation des vols est néanmoins sujette à caution du fait de tirs réguliers venant d’Azerbaïdjan en direction de l’aéroport.
Le défi majeur pour la région du Syunik a été étroitement lié à la situation au Haut-Karabakh. À l’été 2023, le convoi humanitaire arménien, puis européen, s’est positionné au passage de Kornidzor, situé à l’entrée du couloir de Latchine, dans l’espoir de pouvoir ravitailler la population du Haut-Karabakh sous blocus depuis décembre 2022. Deux mois plus tard, le 19 septembre 2023, l’agression militaire de l’Azerbaïdjan contre les Arméniens du Haut-Karabakh a conduit au déplacement forcé de toute la population à partir du 24 septembre. Ces derniers ont trouvé refuge initialement aux points d’enregistrement de Goris et de Kornidzor, puis ont été dispersés dans toute l’Arménie. Actuellement, plusieurs milliers de réfugiés artsakhiotes résident au Syunik. Les autorités locales et la population s’efforcent activement de soutenir leurs compatriotes et à leur faire retrouver un semblant de vie normale. Des projets de construction de logements et de créations d’emplois agricoles sont en cours au niveau de la communauté locale.
Les revendications de l’Azerbaïdjan pour un corridor qui le relierait au Nakhitchevan sans droits de passage ni de contrôle des douanes arméniennes, un temps calmées après le nettoyage ethnique du Haut-Karabakh, repartent de plus belle en ce début 2024. Cette année encore, la région restera dans l’œil du cyclone.